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Ecouter, aimer, c'est guérir

Prédication du Dimanche 6 septembre 2015 à la Paroisse de Bafoussam-Plateau

Textes : Jacques 2, &-5 et Marc 7, 31-37

Chaque village à un défaut dit un célèbre artiste musicien de l’Ouest. Ce constat est juste, mais dangereux, parce qu’il nourrit les préjugés et favorise l’exclusion, le rejet et ne contribue pas à établir entre les hommes un climat de confiance, une intimité. Notre société et notre nation souffrent aujourd’hui de ces considérations. L’Église n’est pas en reste. Les gens sont jugés par rapport à leur appartenance tribale, à leur apparence, à leur classe sociale, à leur bourse. Dans le texte qui précède celui qui constitue le socle de notre message de ce jour, le Seigneur Jésus est en terre païenne. Là, il a guéri la fille d’une femme syrophénécienne. Cette femme a rappelé à Jésus que la grâce de Dieu est pour tous, pour les juifs comme pour les non-juifs. Le récit de la guérison de l’enfant de cette païenne nous rappelle aussi que la grâce n’est pas quantifiable, les miettes suffisent pour accomplir de grandes choses. Il faut seulement la recevoir avec foi. Cela nous interpelle à bien des égards. Nous négligeons certaines grâces et nous ne les recevons pas avec foi. C’est pourquoi nous sommes toujours en train de nous plaindre, de pleurer, de crier. Jésus nous rappelle aussi qu’il peut guérir de loin. Ceux qui vont de pasteur en pasteur, d’église en église à la recherche de guérison ne croient pas en Jésus.

Dans le texte de ce jour, il nous est dit « qu’on lui amena un sourd qui avait la difficulté à parler et on le supplia de lui imposer les mains ». Pauvre homme et pauvres hommes ! C’est triste, ça fait pitié, comme beaucoup me font pitié ici. Cette scène soulève plusieurs problèmes et dévoile les manquements des chrétiens aujourd’hui.

         Le premier problème est celui de savoir qui amène le sourd à Jésus. Ensuite, qui du malade et du docteur prescrit l’ordonnance ? Enfin, qui de la foule et du sourd est réellement sourd ? La réponse à ces questions nous permettra de mieux comprendre ce que Dieu attend de nous en tant que ses disciples.

         « On », est un pronom personnel indéfini. Ce pronom est englobant. Lorsqu’une personne ne veut pas assumer ses propos ou son acte, il dit : on m’a dit, on toujours fait comme ça, on a pris ton mari (peut être c’est celui qui informe qui est l’auteur de cet acte). Pourquoi l’auteur n’identifie pas ceux qui amènent le malade à Christ ? En effet, personne de ceux qui amènent le sourd à Christ ne veut assumer sa responsabilité. Est-ce les membres de sa famille, ses amis, ses voisins ? Personne ne le sait. On sait une chose, ce que l’homme malade est baladé par des gens, puisque le mot grec traduit par « amener » signifie « porter ». Donc, l’homme malade est comme un objet entre leurs mains, il n’a pas de personnalité, ni de dignité, encore moins de décision. On le balade, le trimbale, le porte où on veut et quand on veut, on décide à sa place. Remarquez qu’un sourd n’est pas un aveugle ni un paralytique pour qu’on le porte, pour qu’on l’amène ! La maladie de cet homme, ce n’est donc pas le problème d’ouïe, mais d’attention, de tendresse, d’amour et de respect des. Ce sont ici les maladies dont souffre notre monde matérialiste, technologique, égocentrique, égoïste. Tout s’évalue en termes de gain matériel, d’avoir financier, de réputation sociale. L’homme en tant qu’être n’est pas pris en compte. Même dans les secteurs sensibles de la société comme la médecine, l’éducation, c’est l’argent qui importe. Combien sont morts faute de soin parce qu’ils n’ont pas payé les frais extra médicaux ?

 

Beaucoup dans nos familles, dans notre société et dans l’Église souffrent de la maladie de cet homme et de cette foule. On décide de l’homme ou de la femme qu’ils doivent épouser. On décide de la filière ou de la série qu’ils doivent faire, on décide du concours ou de l’emploi qu’ils doivent exercer. Dans le couple le mari ou la femme en fonction de leur pouvoir financier décide à la place de l’autre. Pour ceux qui sont malades, on les porte chez des guérisseurs, des marabouts, des charlatans sans leur avis. Sur le plan politique, on décide à la place du peuple de qui doit gouverner, qui doit gérer une collectivité locale, qui doit le représenter dans les instances nationales. Parfois, comme dans ce texte, ils peuvent vous conduire à un bon endroit, mais par hasard ! Du coup, ceux qui sont chosifiés deviennent sourds, ils ne peuvent ni entendre ni s’exprimer. Ils sont des sourds et muets passifs. Tandis que la foule est sourde et muette active. N’y a-t-il pas ici ceux qui sont devenus sourds et muets de la sorte ? Des enfants devenus têtus, des femmes insoumises, des citoyens qui ne votent pas, des élèves qui n’apprennent pas, des chrétiens qui subissent tout et ne participent à rien, etc. N’y a-t-il pas lieu d’examiner que, c’est le manque d’écoute, d’attention, d’amour, qui est à la base de ces surdités et de ces mutismes ?

Le sourd dans ce texte, ce n’est pas le malade trimbalé, mais la foule. Elle n’est pas attentive au problème du malade, elle ne fait aucun effort pour l’écouter, elle le chosifie. Le groupe, la majorité sont aussi interpelés ici. Dans nos groupes, nos réunions, nos associations, prend-on soin de la minorité, nos décisions tiennent-elles comptent des faibles ? Dans notre vie quotidienne sommes attentifs aux problèmes des pauvres, aux affamés, aux réfugiés, aux exilés, aux migrants ? Combien de personnes meurent-elles de faim autour de nos palais ?

Écoutez attentivement comment Jésus réagit face au sourd-muet. D’abord, il ne lui impose pas les mains comme la foule le lui a demandé. Peut-être pour éviter l’assonance d’imposition et l’approcher par des gestes plus tendres et affectueux. Il touche au problème de cet homme : la langue et les oreilles. Il faut remarquer que Jésus n’est pas obligé de répondre à notre requête comme nous le désirons. En tant que médecin, c’est lui qui choisit le remède et nous indique la posologie. N’avons-nous pas souvent imposé à Jésus de répondre à nos prières selon nos désirs et nos plans ? Certes, Jésus n’a pas condamné leur demande !

Pour guérir cet homme du manque d’attention et d’amour, Jésus le sort de la foule, il n'est plus mêlé à la foule, il est mis à part. La guérison se développe loin de la masse, dans une relation de personne à personne. Il n’est plus un handicapé, une personne moindre, il est un individu qui est regardé par un autre individu. Le sourd - comme l'aveugle plus loin dans l'Évangile, qui lui aussi est mis à part pour une guérison - n’est plus l’objet d’une foule qui l'utilise pour une guérison ou un tour de magie, il n’est plus une bête de foire confiée à un magicien. Il est l’objet unique de l’attention de Jésus, il est à nouveau individualisé. Jésus s’approche de lui, l’écoute, le touche et lui parle. Du coup le sourd écoute, le muet parle !  Pourquoi ? Parce qu’il est devenu homme, considéré comme une personne qui a une âme et une vie. Jésus lui a donné les preuves d’amour, il l’a réintégré dans l’humanité.

 C’est dans cette perspective que l’Apôtre Jacques nous dit que notre foi en notre Seigneur Jésus soit exempte de toute acception, de tout favoritisme, tout préjugé, de toute exclusion et toute discrimination. Regarder aux apparences, accorder des faveurs à certaines personnes pour leur statut social ou leur appartenance est une gangrène pour l’Église et la société. À cette veille de la rentrée scolaire, les parents sont interpellés par cette recommandation biblique. Nous ne devrons pas être impartiaux dans notre manière d’élever nos enfants. Certains encouragent les garçons et leur accordent plus d’attention, d’autres le font pour les filles. Ce n’est pas juste. Certes, il faut encourager les enfants méritants, mais sachez aussi qu’il y a des enfants qui sont naturellement moins intelligents, ils ne sont pas pourtant des enfants au rabais. Nous devrons leur accorder aussi notre attention. Ce n’est pas juste pour des parents d’envoyer certains à l’école et de laisser d’autres à la maison juste pour le fait qu’ils ont échoué. C’est du favoritisme d’inscrire les uns tôt et d’autre tard. C’est injuste d’acheter des tenues ou des chaussures de valeurs très différentes pour la rentrée où la fête. C’est injuste de payer un répétiteur pour certains enfants et non pour d’autres. Cette recommandation concerne aussi les enfants qui respectent soit le père soit la mère parfois sur des bases matérielles ou affectives. Vous devrez aimer et respecter vos deux parents de la même manière. Il est vrai que certains parents sont difficiles à aborder ou moins proches. Mais, ici encore c’est ce que Christ dénonce ici.

 La recommandation de Jacques aux judéo-chrétiens dispersés dans le monde sur l’acception des personnes en fonction de leurs avoirs est aussi la nôtre aujourd’hui. Sur quelle base désignons-nous les responsables dans l’église ? Nous appelons de jeunes papas juste parce qu’ils sont nantis et des vieux par leur nom parce qu’ils sont démunis ! Le deuil des riches est un grand deuil et on assiste massivement et, mais n’est jamais au courant des deuils des pauvres. Mes collègues pasteurs parlent de grands deuils et des deuils. Et quand c’est le grand, c’est le « corps » du chef. Vous me comprenez bien. D’autres formes d’acception à l’église c’est au niveau chrétien engagé et non engagé ou des spirituels et des charnels. Du coup, on rend visite, on respecte les engagés, les spirituels qui sont parfois spiritueux, et les autres sont laissés à eux-mêmes.

 Pour Jésus, tous les êtres humains sont égaux devant Dieu ; il ne s’est jamais intéressé à la position sociale de ceux à qui il parlait. Que ce soit un chef, un riche, un mendiant, une femme vertueuse ou une prostituée, un prêtre ou un simple Juif, un homme instruit ou ignorant, un religieux ou un païen, un honnête citoyen ou un voleur, ce qui le préoccupait était l’état de son âme. Tous ceux qui croient en Jésus constituent l’Église qui est une grande communauté spirituelle rassemblée sous la bannière de la communion fraternelle pour l’éternité. C’est à cette communion fraternelle sans favoritisme ni discrimination mue par l’amour agapè que Christ nous appelle ce jour. Seule une communion fraternelle construite sur cette base peut faire de notre paroisse une communauté famille, une paroisse différente et d’impact. Si nous ne sommes pas sourds aux besoins des autres et si nous exprimons notre amour pour nos frères, nos sœurs, nos enfants, nos voisins, les sourds écouterons, les muets parlerons, il n’y aura pas d’enfants têtus dans nos familles, pas de femmes insoumises, pas de maris infidèles, pas de rebelle et des bandits dans notre société, pas de corruption dans notre pays et même pas de terroriste. En Christ nous sommes tous des hommes et des femmes de valeurs, en Christ tous les élèves et les étudiants seront sages et intelligents. Béni soit le Seigneur qui ne fait acception de personne !

Amen !           

Par GUIDEME Gabriel, Pasteur proposant

 

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